10 ans après les attentats de novembre 2015 : panser ses plaies en pensant l’après
« Répondre à la haine par la colère, ce serait céder à la même ignorance qui a fait de vous ce que vous êtes »
écrit Antoine Leiris dans son livre Vous n’aurez pas ma haine (2016, Fayard), quelques jours seulement après que sa femme Hélène a été assassinée au Bataclan lors des attentats terroristes du 13 novembre 2015.
C’est tout l’esprit de la séquence que le Théâtre de la Concorde a imaginée pour les dix ans de ces attentats : ne pas répondre à la haine par la colère, à la bêtise aveugle par une même étroitesse d’esprit, mais faire corps pour imaginer la vie d’après, grâce à des spectacles et des rencontres.
Parce que penser ensemble, c’est déjà réparer ; et que l’art, le débat et le partage peuvent rouvrir des espaces de sens et d’espérance.
Panser en comprenant
Rencontre 10 ans après les attentats du 13 novembre, avec Hugo Micheron – 4 novembre à 19h
Parce que penser l’après, c’est aussi regarder le présent en face, cette rencontre menée par le chercheur Hugo Micheron, en partenariat avec Sciences Po, propose un état des lieux de la radicalisation à l’ère numérique.
Avec les interventions d’Arthur Desnouveaux, président de Life for Paris et rescapé du Bataclan, d’Anne Rosencher (L’Express) et d’Elsa Boublil (Théâtre de la Concorde), le débat questionne la transformation des discours de haine en ligne, les stratégies de recrutement et les moyens d’y résister. Une intelligence artificielle viendra même participer à la discussion, symbole d’un futur qui, plus que jamais, doit s’interroger sur ses propres dérives.
Panser en racontant
La vie de château, mon enfance à Versailles, Clémence Madeleine-Perdrillat et Nathaniel H’Limi – 8 novembre à 16h
Au Théâtre de la Concorde, on croit que la création peut être un geste de reconstruction. Dix ans après les attentats de novembre 2015, alors que la mémoire collective oscille entre commémoration et oubli, cette performance autour du film d’animation de Clémence Madeleine-Perdrillat et Nathaniel H’Limi explore la force de l’imaginaire face au traumatisme.
Comment parler du deuil et de la résilience aux enfants ?
Pensée pour un public familial, La vie de château, mon enfance à Versailles mêle dessin, lecture et animation pour raconter l’histoire de Violette, 8 ans, orpheline des attentats du 13 novembre, et de son oncle Régis, agent d’entretien au Château de Versailles. Avec tendresse et poésie, le spectacle invite petits et grands à s’interroger sur la perte, la solidarité et la capacité à se reconstruire ensemble, à hauteur d’enfant.
Panser en témoignant
Les Consolantes, de Pauline Susini – 7 et 8 novembre à 19h
Certaines blessures ne se referment pas ; elles se partagent. Dans Les Consolantes, Pauline Susini fait entendre une polyphonie de voix : celles de victimes, de proches, de soignants, d’amis ou d’inconnus. À partir d’un travail documentaire et d’entretiens, la metteuse en scène compose une fresque sensible sur la mémoire traumatique et l’effort de « continuer ».
Ici, le théâtre devient un espace de réparation collective. Entre tragédie contemporaine et poésie, le spectacle place le public au cœur du dispositif, au plus près des corps et des silences.
Sans pathos mais avec une grande délicatesse, les comédiens incarnent ces figures de l’inconsolé qui, plutôt que de guérir, apprennent à vivre avec leurs absents. Parce que la consolation n’est pas l’oubli, mais une autre manière de faire lien.
Panser en débattant
Rencontres avec la Fondation Jean Jaurès – 7 novembre à 19h30 et 8 novembre à 19h
Face à la tentation de l’oubli, le débat reste un acte de mémoire. Aux côtés de la Fondation Jean-Jaurès et de divers invités, le Théâtre de la Concorde consacre deux jours à l’exploration des notions de mémoire, d’identité et de résilience urbaine.
Dix ans après, qu’est-ce qui fonde encore nos communs ? Comment raconter les attentats ? Comment les commémorer ? Quelle place occupent ces événements dans l’imaginaire collectif ? Les Parisiens y pensent-ils encore ? Ces rencontres entendent interroger la trace laissée par le 13 novembre dans nos vies individuelles et notre vie démocratique, entre commémoration, oubli et transformation.
© Christian Rapa