Malgré la maladie, malgré la guerre, malgré les violences patriarcales, malgré les régimes qui oppriment, malgré les drames intimes qui sont toujours politiques.
Face aux tempêtes qui emportent tout sur leur passage, aux voix qu’on voudrait étouffer, aux existences qu’on préfère ignorer, il devient urgent de proclamer haut et fort : vivre à tout prix. Non pas comme un slogan, mais comme une résistance. Une déclaration d’existence face à tout ce qui voudrait nous faire taire, nous effacer, nous réduire.
C’est ce que nous défendrons en octobre au Théâtre de la Concorde, de la France sous l’occupation à la Russie de Poutine, du Journal de prison d’Albie Sachs, militant anti-apartheid proche de Nelson Mandela au conflit au Proche-Orient, de la remise des Prix Me Too Media au Procès fictif d’une histoire mondiale du patriarcat. Grâce à des pièces de théâtre, des rencontres artistiques inédites, des remises de prix, des stand-up tragi-comiques, des ripostes poétiques.
Faire Concorde, ce n’est pas seulement parler des sujets sur lesquels on est tous d’accord. Faire Concorde, cela implique d’inviter les tabous autour de la table, de faire apparaître la poussière dissimulée sous le tapis, de risquer de solliciter les affects pour ouvrir le débat.
Quand la guerre devient matière artistique
C’est pourquoi nous proposons d’entamer le mois consacré à la lutte pour la vie grâce à deux spectacles qui mettent les pieds dans le plat, en choisissant comme sujet celui dont il ne faut surtout pas parler : le conflit au Proche-Orient. Avec justesse, recul, poésie, et surtout, en laissant un espace de réflexion et d’expression aux spectateurs.
Du 1er au 4 octobre, Mode d’emploi pour metteur en scène en temps de guerre nous plonge dans le regard déchiré de deux créateurs israéliens confrontés à l’impensable. Hannan Ishay et Ido Shaked nous livrent un récit catastrophé et désabusé, né de cette réalité qui a dépassé toute fiction le 7 octobre 2023. Comment continuer à créer quand le monde s’effondre ? Comment témoigner sans trahir ?
Du 7 au 11 octobre, Une histoire subjective du Proche-Orient prolonge cette réflexion par l’intime. Ido Shaked met en scène le parcours d’une jeune femme, magnifiquement interprétée par Lauren Houda Hussein, qui découvre Beyrouth à la veille de la guerre. Entre traumatismes familiaux et fractures politiques, cette histoire personnelle résonne comme un écho universel.
Les voix de la résistance
Vivre à tout prix, c’est aussi refuser que certaines paroles soient confisquées. Le 8 octobre, nous recevrons Albie Sachs, l’avocat de Nelson Mandela, qui témoignera de son emprisonnement en 1963 et de son engagement contre l’apartheid. Quelques jours avant la panthéonisation de Robert Badinter, cette rencontre exceptionnelle nous rappelle que la justice n’est jamais acquise.
Le 9 octobre, la grande soirée de remise des prix Me Too Media célèbrera celles et ceux dont le travail contribue à une meilleure compréhension des violences sexistes et sexuelles. Parce que vivre à tout prix, c’est créer les conditions d’une parole libératrice pour les femmes victimes de violences.
Le 11 octobre, le Procès fictif d’une histoire du patriarcat transformera notre théâtre en cour d’assises. Au banc des accusés : le patriarcat en bande organisée, incarné par Holopherne, cette figure mythologique qui cristallise des siècles d’oppression. Une justice poétique et implacable, rendue par et pour les femmes.
Du 7 au 10 octobre, tt si on réinventait la démocratie… ensemble ? Nos Assemblées transforme le public en assemblée délibérante, explorant nos capacités collectives à faire société. Une expérience politique vivante qui interroge : comment faire assemblée aujourd’hui ? Qu’est-ce qui nous rassemble vraiment ?
Les blessures qui parlent
Vivre à tout prix, c’est aussi donner voix à ce qui se tait. Le 7 octobre, la photographe Claire Delfino nous présentera son travail sur les jeunes souffrant de maladie mentale avec sa série Archipel du Soin. Parce que la pédopsychiatrie reste un parent pauvre de la médecine, et que notre représentation de la maladie mentale doit évoluer.
Du 17 au 18 octobre, Tu seras un homme papa nous confrontera à l’indicible : le deuil périnatal. Gaël Leiblang raconte les 13 jours que son fils Roman a passés sur terre, dans un texte à la fois physique et pudique. Une traversée bouleversante suivie d’échanges avec des partenaires médicaux et associatifs.
Du 18 au 25 octobre, Femme non rééducable rendra hommage à Anna Politkovskaïa, journaliste russe assassinée en 2006 après avoir couvert la guerre de Tchétchénie. Un témoignage nécessaire alors que Poutine sévit encore et que la guerre en Ukraine fait rage.
Les voix de l’exil
Du 21 au 25 octobre, Je ne me plains pas nous emmènera dans l’univers de Taym, neuf ans, arrivé en France avec une langue dans la tête et une autre dans l’oreille. Le récit d’un déracinement qui devient tissage, entre mémoire et transmission, entre passé et avenir.
Du 28 au 31 octobre, Les Nuits de la Colère d’Armand Salacrou clôturera ce mois intense. Un règlement de compte poétique et métaphysique au lendemain de la Seconde Guerre mondiale, porté par quinze comédiens venus de tous horizons dans une création de la compagnie Calvero.
Tout au long du mois, nous proposons également des rencontres, des débats, des moments de partage. Le 4 octobre, Travailler demain avec Muriel Pénicaud et Philippe Martinez questionnera l’avenir du travail. Le 15 octobre, La Contrebande de Fabrice Melquiot donnera la parole à dix femmes dans un concert-lecture porté par de grandes actrices et Emily Loizeau.
Octobre au Théâtre de la Concorde, c’est un mois de résistance, de témoignages, de combats. Parce que vivre à tout prix, ce n’est pas seulement survivre. C’est affirmer que chaque existence mérite d’être vécue, racontée, défendue. C’est refuser que la violence, la maladie, l’oppression aient le dernier mot. C’est faire du théâtre un espace de liberté, de dignité, de renaissance.